lundi 13 septembre 2010

L'épopée du j'pense à moi

Il y a un an environ, j'ai écrit un billet avec ce titre. J'avais décidé à l'époque de ne pas le publier. Je ne saurais dire pourquoi aujourd'hui.

Cet après-midi, j'ai eu une discussion avec deux femmes que je connais depuis six ans. Nous avions une réunion bien informelle et un des membres de notre groupe, le seul homme, n'avait pu se joindre à nous. Cette fin de semaine, il a placé son père dans une maison de retraite et il ne se sentait vraiment pas capable de participer à notre réunion.

Les deux dames se sont ensuite mises à parler d'une autre personne qui travaille dans notre édifice et dont les deux parents ont été placés en maison de retraite tout récemment. Cette personne est handicapée et depuis quelques semaines, on la voit dépérir. De toute évidence, elle n'est pas suffisamment autonome pour s'occuper toute seule d'elle. Ses parents n'habitant plus avec elle, mes collègues s'inquiétaient pour sa propre santé.

Tout ça m'a rendue bien triste. Mes parents à moi sont encore jeune, ils travaillent tous les deux et sont en pleine forme. Ce n'est pas demain la veille que ma soeur et moi devront prendre ce genre de décision.

Mais je ne peux s'empêcher d'y penser. Mon père a une tumeur au rein et on ne connait pas encore le sérieux du cancer. C'est possiblement très bénin, mais comme mon père refuse d'en parler, ma soeur et moi sommes dans l'inconnu.

Pourquoi ne veut-il pas en discuter? Je crois que c'est parce qu'il vit des moments difficiles avec sa propre soeur qui combat un cancer du sein... et un million d'autres choses. Ma tante n'est pas une femme très gentille. Toute sa vie, elle a été seule parce qu'elle n'a jamais su bien traiter les gens autour d'elle. Être malade et dépendante des soins de sa famille ne l'a pas transformée, bien au contraire. Elle ne peut se déplacer sans marchette, elle porte des couches et en portera toute sa vie, elle refuse de manger et elle ne peut pas prendre de bonnes décisions. Puis, pour couronner le tout, malgré un compte en banque beaucoup plus que bien garni, elle refuse de dépenser un seul sous pour ses soins. Elle pousse même l'avarice jusqu'à garder la même couche toute la journée.

Ce n'est pas facile pour mon père. Elle téléphone constamment. Et ce ne sont pas de gentils appels. Elle peut se montrer paniquée ou encore carrément insultante. Si seulement ça s'arrêtait là... Elle fait le même coup aux deux autres frères et soeurs qui eux, appellent mon père à leur tour. Elle est en train de rendre toute la famille complètement folle.

Je crois qu'il est temps pour la famille de s'asseoir et de la placer en curatelle. Elle ne peut plus prendre les bonnes décisions pour sa santé et en ce moment, elle joue au petit dictateur en utilisant son compte de banque bien garni pour faire des menaces et obtenir ce qu'elle veut... ce fameux héritage dont toute la famille se fout.

En plus de tout ça, il faut dire que ma tante est hospitalisée à Montréal, où elle habite. Mon père y va donc au moins une fois par semaine. Gatineau-Montréal, ce n'est pas si loin, mais quand même.

Je vois mon père dépérir. Il est de plus en plus stressé. Il est inquiet pour sa santé aussi, mais il n'a même pas le temps de s'en occuper. Et tout ça cause de la chicane entre lui et ma mère en plus. Pas moyen de s'en sortir.

Et moi? C'est difficile de vivre tout ça. Je n'ai jamais été proche de ma tante. Je doute qu'elle connaisse le nom de mon fils, ou même qu'elle s'y intéresse. Je crois qu'elle ne me reconnaitrait même pas dans la rue si elle me croisait. Mais je vois mon père. Son visage fermé et ses yeux fatigués. Quand il est comme ça, on ne sait pas comment le prendre. Des réflexes de l'enfance peut-être, mais on a peur de lui poser une question qui le stresserait davantage. Mon père n'est pas un homme difficile, mais parfois, c'est difficile. Il y a une expression en anglais... to be on edge. Ça lui ressemble. On a l'impression qu'il est au bord et on ne veut surtout pas être responsable du mouvement qui le bousculerait de l'autre côté.

Wow... j'ai dérapé ce soir...

Tout ça pour dire qu'à l'époque où tout ce qu'on entend est "pense à toi; occupe-toi de toi; prends du temps pour toi" c'est un peu démodé de penser aux autres. Mais comment faire autrement? Et comment aller bien si on ne s'occupe pas des personnes qu'on aime et qui ont besoin de nous?

J'espère que mon père ira bien.

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